dimanche 30 décembre 2012

Du duc à la duchesse d'Aiguillon.

D'Aiguillon dans l'histoire de la Nouvelle-France

Les boiseries à l'intérieur de l'hôtel du Parlement de Québec sont ornées des armoiries de personnages de l'histoire de la Nouvelle-France jusqu'aux premières années du parlementarisme sur les rives du Saint-Laurent. Eugène-Étienne Taché attribue des armoiries à la plupart d'entre eux.

Armoiries du 1er duc d'Aiguillon
Assemblée nationale du Québec
Ainsi, nous retrouvons sous le nom D'Aiguillon, les armoiries qui se blasonnent : écartelé, en 1 et 4 : coupé et parti en 3, au premier fascé de gueules et d'argent, au second d'azur semé de lys d'or et au lambel de gueules, au troisième d'argent à la croix potencée d'or, cantonnée de quatre croisettes du même, au quatrième d'or aux quatre pals de gueules au cinquième parti d'azur semé de lys d'or et à la bordure de gueules, au sixième d'azur au lion contourné d'or, armé, lampassé et couronné de gueules, au septième d'or au lion de sable armé et lampassé de gueules, au huitième d'azur semé de croisettes d'or et aux deux bars d'or. Sur le tout d'or à la bande de gueules chargée de trois alérions d'argent le tout brisé d'un lambel de gueules; en 2 et 3 contre-écartelé en 1 et 4 d'azur, à trois fleurs de lys d'or, à la bordure endentée de gueules et d'or et en 2 et 3 d'azur, à l'aigle d'argent, becquée, languée et couronnée d'or.

Or, la présence du nom d'Aiguillon au Parlement ne se justifie qu'en raison de l'important rôle qu'a joué Marie-Madeleine de Vignerot, dame de Combalet, duchesse d’Aiguillon (1604 - 1675) dans la fondation de l'Hôtel-Dieu de Québec. Fille de René de Vignerot et de Françoise Duplessis (sœur du cardinal de Richelieu), elle fut mariée à Antoine Pont du Roure, marquis de Combalet et neveu du duc de Luynes, pour qui elle conçut une telle aversion que quand il fut tué lors des dernières guerres de religion, de peur que, par quelques raisons d’État, on ne la sacrifiât encore, elle fit vœu de ne jamais se marier et de se faire carmélite. Après avoir échoué dans plusieurs projets de mariage avec les premières maisons de France, le cardinal-ministre acheta le duché d’Aiguillon pour sa nièce en 1638. Elle fut dame d’atour de Marie de Médicis. Après la mort du cardinal, elle hérita d’une partie de ses biens, et employa presque toute sa fortune à soulager les pauvres et à fonder des établissements de charité, dont l'Hôtel-Dieu de Québec.

Armoiries duchesse d'Aiguillon
Vitrail - Hôtel-Dieu de Québec
Les Augustines de la Miséricorde ont bien souligné le rôle de la duchesse D'Aiguillon en ornant l'une des fenêtres du pavillon d'Aiguillon d'un vitrail aux armes de la duchesse. Elles se blasonnent : écartelé en 1 et 4 d'or à trois hures de sanglier de sable; et en 2 et 3, d'argent aux trois chevrons de gueules. L'écu, entourer de l'Ordre des Dames chevalières de la Cordelière, est posé sur un manteau armorié doublé d'hermine et timbré d'une couronne ducale. C'est armoiries ce retrouvent aussi sur la façade de l'entrée du monastère des Augustines.

Nous voilà avec des armoiries qui n’ont rien en commun. Pour trouver qui de Taché ou des Augustines de l'Hôtel-Dieu a raison, nous devons chercher dans l'histoire du duché d'Aiguillon. Elle commence en 1599, lorsque le roi Henri IV érigea les baronnies d'Aiguillon, Montpezat, Sainte-Livrade et Dolmayrac en duché-pairie en faveur d'Henri de Lorraine, fils aîné de Charles de Lorraine, duc de Mayenne, pair de France, et de ses successeurs et ayants cause. En 1632, au décès du troisième duc, sans descendance directe, le duché-pairie est réintégré à la couronne de France.



Armoiries d'Antoine de l'Age.
De Valles, Recueil des armoiries
des pairs de France.
Paris, 1634
Le duché est recréé en 1634, au bénéfice de Antoine de l'Age qui le perdra à la suite de sa disgrâce, en 1635. Le cardinal de Richelieu attribue le duché-pairie d'Aiguillon à sa nièce Marie Madeleine de Vignerot, en 1638. Le duché d'Aiguillon est, à l'origine, l'un des rares titres français transmissibles exceptionnellement par primogéniture sans exclusion des filles. Le titre s'éteint en 1704, au décès de la seconde duchesse. Son neveu, Louis de Vignerot du Plessis (1654-1730), marquis de Richelieu, comte d'Agenois et baron de Québriac, ne portant pas le titre. Il sera rétabli le 10 mai 1731 au profit de son fils, Armand Louis de Vignerot du Plessis (1683-1750), duc d'Aiguillon et comte d'Agenois, pair de France.

En 1800, le quatrième duc d'Aiguillon étant décédé sans postérité, le titre ne se transmettant plus par les femmes, il passe à son cousin le plus proche Armand Emmanuel du Plessis de Richelieu, duc de Richelieu et Maréchal de France, Président du Conseil des ministres sous Louis XVIII. En effet, le maréchal-duc de Richelieu (1766-1822) était le descendant direct d'Armand-Jean de Vignerot du Plessis de Richelieu (1629-1715), neveu du cardinal et frère de Jean-Baptiste Amador (1632-1662) et de la seconde duchesse Marie-Madeleine Thérèse de Vignerot du Plessis (1636-1704).

Voir la liste des ducs d'Aiguillon pour plus de détail : http://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_des_ducs_d'Aiguillon

Le premier duc d'Aiguillon, Henri de Lorraine est né le 20 décembre 1578 à Dijon. Il est le fils aîné de Charles de Mayenne, duc de Mayenne et d'Henriette de Savoie-Villars, fille du maréchal de Villars. Il est ainsi membre de la Maison de Lorraine-Vaudémont, précisément de la branche cadette de la Maison de Guise et du rameau de Mayenne. Il épousa, à Soissons, en février 1599, Henriette de Nevers (1571 - 1601), fille de Louis IV, duc de Nevers et de Rethel, et d'Henriette de Clèves, mais ils n'eurent pas d'enfants. Il est décédé le 20 septembre 1621 à Montauban.


Armoiries de Charles de Lorraine.
De Valles, Recueil des chevaliers de
l'ordre du Saint Esprit
. Paris 1631
Charles de Lorraine portait les armes suivantes : écartelé, en 1 et 4 : coupé et parti en 3, au premier fascé de gueules et d'argent, au second d'azur semé de lys d'or et au lambel de gueules, au troisième d'argent à la croix potencée d'or, cantonnée de quatre croisettes du même, au quatrième d'or aux quatre pals de gueules au cinquième parti d'azur semé de lys d'or et à la bordure de gueules, au sixième d'azur au lion contourné d'or, armé, lampassé et couronné de gueules, au septième d'or au lion de sable armé et lampassé de gueules, au huitième d'azur semé de croisettes d'or et aux deux bars d'or. Sur le tout d'or à la bande de gueules chargée de trois alérions d'argent le tout brisé d'un lambel de gueules (de Guise); en 2 et 3 contre-écartelé en 1 et 4 d'azur, à trois fleurs de lys d'or, à la bordure endentée de gueules et d'or (Ferrare) et en 2 et 3 d'azur, à l'aigle d'argent, becquée, languée et couronnée d'or (Este). Ce sont les armoiries qui figure sur le panneau à l'hôtel du Parlement de Québec.

Pour sa part, la seconde duchesse d'Aiguillon, Marie-Madeleine Thérèse de Vignerot du Plessis (1636-1704), portait les armes suivantes : écartelé en 1 et 4 d'or à trois hures de sanglier de sable; et en 2 et 3, d'argent aux trois chevrons de gueules, comme en fait foi la reliure de maroquin brun foncé, au pointillé, aux armes de Marie-Madeleine-Thérèse de Vignerot, duchesse d'Aiguillon, dans un médaillon brun clair conservé aux Archives nationales de France.

À défaut de document original prouvant qu'elles sont les armoiries qu'utilisait Marie Madeleine de Vignerot, il est plus probable que, comme l'affirme François-Alexandre Aubert de La Chenaye-Desbois dans son Dictionnaire de la Noblesse publié en 1876 (vol. 19, p. 737), la première duchesse d'Aiguillon utilisait les armes des Vignerot : d'or à trois hures de sanglier de sable. Toujours est-il que nous pouvons admirer les armes du père du premier duc d'Aiguillon au Parlement de Québec et celles des Vignerot du Plessis-Richelieu, la seconde maison d'Aiguillon à l'Hôtel-Dieu de Québec. 

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